Interview - Olympia (Paris) - 21 janvier 2020
(Phases)
Tim, tes compositions sont inspirées principalement de tes expériences personnelles. Votre dernier album concerne ce que tu as traversé il y a quelques années. As-tu déjà écrit des chansons sur la prochaine étape de ta vie ?
(Tim) Je ne sais pas … J’ai écrit quelques chansons récemment. Mais je ne sais pas vraiment de quoi elles parlent, je ne suis pas vraiment sûr de connaître la prochaine étape de ma vie. Je pense que, si j’écris sur quelque chose en ce moment, cela concerne probablement juste l’incertitude de la vie (rires). Donc encore des chansons joyeuses (rires). Je trouve qu’il me faut beaucoup de temps pour exprimer clairement ce que je veux dire à propos de quoi que ce soit, des années.
C’est un long processus donc ?
(Tim) Oui, c’est un long processus. Je pense que si vous voulez dire quelque chose – enfin, pour moi en tout cas – si je veux dire quelque chose qui a du sens, il me faut beaucoup de temps pour comprendre ce que je veux dire. Et je pense que j’ai besoin d’un peu de perspective sur la vie pour faire ça. Alors, oui, ça prend des années. Je suis très lent.
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(The Way I Feel)
Quand avez vous ri et pleuré pour la dernière fois ?
(Jesse) Nous rigolons tout le temps, n’est-ce pas ? Vraiment beaucoup.
(Tim) Oui c’est vrai.
Qui est le blagueur du groupe ?
(Jesse) Plus Tom maintenant, non ? Ces temps-ci, il est plus marrant qu’auparavant (rires). Pas super marrant, mais …
(Tim) Il essaie.
(Jesse) Il essaie vraiment.
(Tim) Non, il est très drôle. Je pense qu’on a tous nos périodes, non ? Je suppose que nous avons partagé beaucoup de moments ensemble, donc il y a de quoi rire. Et c’est sympa que l’on s’amuse entre nous. Il y a beaucoup de temps morts, quand on est dans un groupe de musique, donc c’est bien de pouvoir rigoler. Et parfois, vous avez besoin de rire un peu pour passer les moments difficiles.
C’est bien alors, vous riez plus que vous ne pleurez ces temps-ci.
(Jesse) Oui, j’espère bien. Je ne me souviens pas la dernière fois que j’ai pleuré … Je pense que la dernière fois c’était en regardant « La Méthode Kominsky », ou quelque chose comme ça. C’était sensé être drôle (rires).
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(Tear Up This Town)
Voudriez-vous vous essayer aux concerts symphoniques ?
(Jesse) Vous voulez dire … avec un orchestre ?
Oui. Sur scène.
(Jesse) Je vais te dire ce qui serait sympa. Est-ce que tu te souviens quand nous étions avec l’armée chinoise, et que nous avons rencontré cet orchestre de folklore traditionnel chinois ? Travailler avec un orchestre qui utilise des instruments qui nous semblent incompréhensibles. J’adorerais faire ça, plutôt que de travailler avec un orchestre européen traditionnel.
(Tim) Je pense que ce serait vraiment intéressant de pouvoir faire de la musique ensemble, ou plus particulièrement en composer.
Donc, faire quelque chose de nouveau ?
(Tim) Oui, quelque chose de nouveau. J’hésite toujours à dire ce genre de choses, que nous ne ferons jamais telle ou telle chose. Parce que deux ans plus tard, on se retrouve à la faire. Mais je trouve toujours ça un peu ringard quand les gens …
(Jesse) Font jouer un orchestre.
(Tim) Oui, ces « tournées avec orchestre ».
(Jesse) Ou alors ça colle, parce qu’un orchestre a joué beaucoup de chansons de Queen [ndlr : Tom avait fait une tournée avec un orchestre qui jouait les chansons de Queen, en avril 2019]
(Tim) Oui …
(Jesse) Il faudrait qu’on soit fous.
(Tim) Je pense que ce serait super de faire quelque chose de nouveau, avec n’importe quel orchestre. Mais j’aime l’idée – comme quand nous étions à Pékin – d’entendre un style de musique et des sons complètement nouveaux, pour moi en tout cas. C’est assez excitant, parce que, parfois, vous pensez que vous avez tout entendu, et c’est super d’entendre des choses complètement nouvelles se créer.
Donc, ça pourrait être un « Night Train » – 2e volet.
(Tim) Oui ce serait bien.
(Jesse) Fright train (le train de l’angoisse)
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(On the road)
Vous êtes en tournée depuis quelques mois maintenant. Qu’est-ce que ça fait d’être sur la route à nouveau – depuis tant d’années ? Est-ce que des choses ont changé ?
(Tim) J’adore.
(Jesse) J’ai l’impression que beaucoup de choses ont changé. C’est à la fois plus facile et plus difficile. Tu vois ce que je veux dire ? C’est plus dur d’être loin de chez soi, parce qu’on a tous une famille et des enfants. Mais c’est plus facile dans le sens où nous sommes plus gentils avec nous même en quelque sorte. Je veux dire, nous sommes plus en forme …
(Tim) Oui, nous en sommes tous au même point dans nos vies, et cela t’aide à comprendre les besoins des autres.
Est-ce que ça veut dire que vous êtes plus heureux qu’avant ?
(Tim) Je pense que, chaque jour, si vous êtes avec les même quatre personnes tous les jours, cela aide de se comprendre et se soutenir mutuellement. Car autrement, si vous ne vous comprenez pas, et que les gens se fâchent ou sont contrariés, et vous ne pouvez pas comprendre pourquoi, cela peut rendre le quotidien difficile. Et c’est pareil dans toute relation. Mais c’est beaucoup plus facile si vous faites l’effort de vous comprendre, et de comprendre l’autre.
(Jesse) C’est bien d’être tous avec des enfants. C’est comme si nous formions un peu un groupe de soutien, n’est-ce pas ? Il y a toujours quelqu’un qui a quelque chose qui le tracasse à propos de son enfant. Nous disons tous « Je me suis inquiété pour le mien parce que… bla-bla-bla », et ensuite nous nous apportons du soutien, ce qui est vraiment bien. Particulièrement pour les hommes, qui ne sont pas doués pour faire ce genre de choses.
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(Everybody’s changing)
Votre communication en tant que groupe passe beaucoup par les réseaux sociaux de nos jours. Est-ce que c’était facile pour vous de vous habituer à ce nouveau mode de communication ?
(Jesse) J’ai l’impression que les gens considèrent que ce n’est qu’une seule chose, mais il y a bien plus derrière. Il y a un élément de diffusion de l’information, essayer de faire passer l’information aux gens. C’est une chose. Mais la partie que je trouve difficile, c’est d’essayer de faire des choses qui semblent authentiques, vous voyez ? Plutôt que de bombarder les gens.
Et est-ce que vous prenez part à la stratégie de communication sur les réseaux sociaux du groupe, à un certain point ? Ou est-ce que vous tweetez juste pour vous ?
(Jesse) On le dit si quelque chose ne nous paraît pas bien, non ?
(Tim) Oui, nous avons nos opinions à ce sujet. Pour moi, la meilleure façon de faire est d’être authentique. Parce qu’essayer d’être … certaines personnes sont très naturelles avec ça, et elles sont très douées pour être folles ou super enthousiastes ou pour poster sans cesse de nouvelles choses. Et c’est génial, cela convient très bien aux réseaux sociaux. Mais, si vous n’êtes pas comme ça, et je ne pense pas que nous le soyons.
Richard est sur les réseaux sociaux depuis un bon moment déjà, sur Twitter.
(Jesse) Oui, il a beaucoup à dire.
Sur les vélos.
(Jesse) Les vélos et le café.
(Tim) Mais son fil d’actualité est une véritable représentation de lui-même, comme pour moi. Donc, nous devons toujours nous assurer que ce soit représentatif de qui nous sommes.
(Jesse) Et ne pas le faire juste parce que nous sentons que c’est ce qu’on est censés faire.
(Tim) Nous n’essayons pas de nous conformer à une idée de quelqu’un d’autre sur ce que nous devrions être, j’imagine.
Et l’année dernière, vous avez lancé le groupe Facebook « Thread ». Est-ce que vous y allez parfois, pour lire ce dont parlent les fans ?
(Tim) … Non (rires) … Je ne suis même pas sur Facebook. Mais les gens m’en parlent parfois. Je pense que c’est une très bonne chose.
Il y a beaucoup de choses qui s’y passent.
(Tim) Ah bon ? Qu’est-ce qu’on doit savoir ?
Allez voir sur le groupe et vous le saurez.
(Jesse) Il y avait un forum de discussion à une époque, n’est-ce pas ? Est-ce que tu te rappelles comme le forum était à la fois une bénédiction et une malédiction ? Car certaines personnes se disputaient à propos de certaines choses, et elles devenaient désagréables entre elles.
Mais il n’y a pas beaucoup de disputes je pense, sur ce nouveau groupe Thread. C’est plutôt positif. Il y a beaucoup d’échanges entre les fans.
(Tim) J’ai toujours senti que globalement, il y a beaucoup de positivité entre les fans de Keane. Nous nous sommes toujours sentis très connectés aux gens et quand nous avons commencé, j’ai fait le premier site web pour Keane. Et le premier forum. Donc, on ne perd jamais totalement cette volonté d’être connectés et de se sentir responsables. On se sent toujours responsables, et si quelqu’un sur Twitter se plaint que …
(Jesse) Si quelqu’un de plaint à propos de l’album.
(Tim) Oui exactement, et alors on sent qu’on doit faire quelque chose à ce propos, par nous même. Je pense que si j’allais sur Thread, je commencerais à me sentir très stressé, très rapidement. Peut-être.
Quel réseau social préférez-vous ? Instagram ? Twitter ?
(Jesse) J’aime bien Instagram, bien que je pense qu’ils l’ont trop complexifié maintenant. J’aimais bien quand c’était juste un flux de photos, mais maintenant c’est un peu …
Tu n’aimes pas les stories.
(Jesse) J’essaie. Parce que mon attitude vis-à-vis de cela – je n’aime pas ça, mais je me dis aussi que je ne veux pas être de ces gens qui finissent par être vieux et grognons avec tous les jeunes. Parce que c’est la façon dont le monde évolue. Donc je pense que c’est important d’essayer de trouver la manière de s’engager là dedans qui soit authentique et qui te convienne. Pour moi, tout ce que je veux faire, c’est prendre une photo originale que je trouve cool, ou dire aux gens quelle musique j’aime. Si quiconque essayait de me faire faire autre chose, j’arrêterais d’apprécier de le faire. J’aime bien poster des choses, mais je ne le ferai pas.
Donc vous ne laisseriez pas vos maisons de disque vous dire quoi faire sur les réseaux sociaux ?
(Jesse) Parfois ils font des choses, mais nous disons « non » (rires).
Merci à Laurent (super intervieweur), Marie (super traductrice) pour leur aide, merci à Keane et leur équipe (super management du super groupe), ainsi qu’à Ronan (super membre fondateur du site) pour avoir rendu cette interview possible !